Implantations logistiques : le match France-Allemagne est-il vraiment gagné ?

Le récent classement de la Banque Mondiale sur la compétitivité logistique des pays ne place la France qu’à la 16ème place, bien après l’Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique ou la Grande-Bretagne.

De nombreux groupes, notamment dans l’e-commerce, mettent en concurrence les territoires européens avant de choisir une implantation. Dans cette compétition européenne, la France a une place à jouer, souvent en concurrence avec l’Allemagne ou le Benelux (Belgique, Pays-Bas et Luxembourg).

Le marché allemand de l’immobilier logistique représente 60% de plus que celui de la France, montrant la réalité de cette compétition intra-européenne. L’exemple le plus récent est celui de Zalando, qui a choisi de réaliser un centre logistique de 130 000 m² à Lahr, en Allemagne, à quelques kilomètres seulement de la France.

Différents paramètres entrent en ligne de compte dans le choix d’une implantation logistique.

Le premier paramètre étudié est le transport. Le transport amont, généralement en charges complètes, est assez peu impactant. Par contre, le transport aval, souvent atomisé en fonction des clients, représente un enjeu économique essentiel. Si l’entrepôt est à Bordeaux, Paris, Bruxelles, Luxembourg ou Cologne, quelles seront les différences en termes de coût et de délai sur les expéditions ? Les résultats dépendront beaucoup de la répartition géographique des clients et de l’offre transport.

Le second paramètre est le site logistique. Il génère un coût immobilier, un coût d’exploitation (charges de personnel notamment), des charges de fonctionnement et des taxes.

La France a toujours été compétitive sur le prix du foncier, moins rare en France que dans d’autres pays européens. Elle est par contre pénalisée par un cadre réglementaire, qui n’est malheureusement pas homogène sur le plan européen. Globalement, les loyers proposés en France sont inférieurs à ce qu’ils sont dans plusieurs pays européens, notamment l’Allemagne et les Pays-Bas.
Sur le plan social, les lentes évolutions réglementaires ne permettront pas à court terme de réduire l’écart existant entre la France et ses voisins.

A titre d’exemple, la réglementation sur la pénibilité au travail, et notamment les facteurs concernant la manutention et le bruit, qui sont applicables à compter du 1er juillet 2016, créent pour les entreprises des contraintes supplémentaires.

La solution choisie est alors plus que jamais un inexorable essor de la mécanisation mais aussi de la robotisation.

Les enjeux sont clairement de réduire le coût de la préparation de commandes, des inventaires, du rangement des palettes ou des colis en imaginant des solutions automatiques. Les exemples sont nombreux. Les technologies goods-to-man sont maintenant opérationnelles et permettent de réduire le nombre d’opérateurs dans un entrepôt. C’est aussi le cas des trieurs, des robots de stockage comme ceux mis en place par E.Leclerc ou des drones d’inventaires.

De ce fait, le manque de compétitivité de la France sera progressivement compensé par une automatisation plus importante, permettant d’accompagner la demande des clients dans la maîtrise des coûts.

L’emploi dans la logistique risque de souffrir de cette tendance profonde de recours à des mécanisations souvent produites outre-Rhin.
La réglementation concernant la pénibilité pourrait aboutir à une baisse de l'emploi Logistique en France et une augmentation de l'emploi dans l'industrie Allemande !

Reste le volet fiscal. Les niveaux de fiscalité qui impactent les activités logistiques sont de plus en plus significatifs dans les analyses.
La fiscalité locale correspond à une part importante de la charge locative. La compétition entre les territoires, en intégrant les taux de taxe foncière et de CFE (Cotisation Foncière des Entreprises), est très marquée et la France n’est probablement pas toujours bien placée par rapport aux pays voisins.

D’une façon globale, le coût d’entreposage, constitué de l’immobilier, mais aussi de l’énergie, du personnel et des équipements est en France un des plus élevés d’Europe. Il n’est dépassé que par les seuls pays scandinaves. Il est de 10% supérieur à celui constaté en Allemagne ou en Grande-Bretagne, essentiellement du fait du différentiel salarial (source Fraunhofer SCS).

Mais la France continue d’attirer des implantations logistiques en grand nombre, grâce à son marché intérieur, son positionnement européen, ses infrastructures et sa productivité.

Ce dynamisme reste toutefois fragile et la compétitivité logistique, source d’emplois et de développement économique devient un sujet majeur à une époque marquée par la maîtrise des coûts.

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