Les market places de commerces locaux, une opportunité pour dynamiser les centres villes

Dans de nombreuses villes françaises, le commerce de proximité souffre de l’évolution même de la consommation et du commerce. Le phénomène n’est pas totalement nouveau mais prend une ampleur inédite depuis quelques années.
Le premier facteur marquant a été le développement, depuis plusieurs décennies, des centres commerciaux, des zones commerciales, et plus récemment des retail parks, en périphérie des villes. Entre 2000 et 2016, les surfaces commerciales se sont accrues de 3% par an alors que la croissance du PIB n’était que de 1,5%. Le commerce n’est d’ailleurs pas le seul à avoir délaissé le centre-ville. L’habitat s’est souvent déplacé. Les services publics eux-mêmes se sont souvent repositionnés en périphérie.




Plus récemment, l’e-commerce, qui représente déjà plus de 8% de la consommation en France, concurrence de façon directe certains secteurs, comme les produits culturels, l’habillement, la chaussure, l’électronique grand public ou encore l’électroménager.

Un troisième facteur, lié à la digitalisation de certains produits, tels que la banque, l’assurance, la musique, les voyages ou bien le courrier, touche de façon non moins violente le commerce physique.

Ces trois évolutions profondes mettent en difficulté le commerce physique, en particulier celui situé en centre-ville, souvent le plus fragile.

Pour faire face à ces difficultés, un certain nombre de villes en France ont décidé de réagir. Les moyens d’actions sont nombreux : rénovation des centres villes, stationnement gratuit, achat de locaux mis à disposition de commerces éphémères, création d’événements. La santé du commerce de centre-ville, au-delà de l’aspect commercial qui nous préoccupe ici, est révélateur d’autres problématiques urbaines : étalement urbain, sécurité, mixité sociale, politique de déplacements ...

Les actions les plus innovantes consistent à aider le commerce physique traditionnel à se doter des mêmes armes que le commerce actuel, l’omnicanal. Le commerce physique peut ainsi créer son site internet, commercialiser ses produits et les expédier, proposer des services de click & collect. Mais tout seul, il reste faible face aux grands acteurs de l’e-commerce et du commerce physique. La solution trouvée par certaines villes est de recréer sur Internet la place de marché que constitue naturellement un centre-ville. Les différents commerces proposent leurs produits sur une market place numérique. Le consommateur peut utiliser une adresse unique, la market place locale, lui permettant de se renseigner sur des produits, de les commander. Ces market places sont parfois complétées par de nombreux services : information locale, animation, annuaire, publicité, fidélisation des clients. Elles s’adressent en priorité aux commerces de centre-ville mais n’excluent pas pour autant les commerces installés en périphérie et les producteurs locaux. Il s’agit ainsi d’un site web fédérateur des commerces d’une localité ou parfois d’une région.

La première ville qui a mis en place cette démarche est Le Puy-en-Velay, avec la market place www.achetezaupuy.com. Cette market place est couplée avec une organisation logistique, pilotée par un manager de centre-ville. Le consommateur peut commander des produits chez ses commerçants et a le choix entre différentes solutions : livraison à domicile dans la région, expédition en dehors de la région, collecte à un point relais ou du click & collect directement chez les commerçants.

D’autres villes ou régions ont initié de telles démarches. Nous pouvons par exemple citer Montluçon (www.achetezamontlucon.fr), l’Auvergne et Aveyron (www.fan-et-compagnie.fr) ou Dropbird à Rennes.

De telles initiatives existent également dans d’autres pays, notamment en Suisse (www.kaloka.ch) ou en Belgique (www.nearshop.be). Ces initiatives ne concernent pas exclusivement des régions rurales ou villes moyennes mais de plus en plus souvent des grandes agglomérations.

Avec une forme assez proche, mais liée à des initiatives totalement privées, les solutions locales, en particulier parisiennes de La Crème (www.lacreme-lacreme.fr), Au Pas de Courses (www.aupasdecourses.com), C’est frais (www.cestfrais.fr) ou Epicery (www.epicery.com), sociétés récemment acquises par Monoprix, peuvent se rapprocher des modèles de market places locales. Elles s’adressent toutefois à des populations aisées de quartiers parisiens, qui souhaitent continuer à faire vivre leurs commerces, mais qui n’ont pas nécessairement le temps disponible pour effectuer leurs achats.

Initiative publique ou privée, la market place de commerces de proximité répond à des exigences de visibilité sur Internet, de qualité des commerces et des produits, mais aussi d’un service logistique performant et rapide, dans le respect de l’intégrité des produits, notamment les produits frais.

La clé de la réussite de ces modèles tient essentiellement sur la responsabilisation du consommateur qui accepte de moins en moins la disparition des commerces dans sa ville mais souhaite aussi disposer des moyens les plus performants et les plus modernes afin de réaliser son parcours client.

Si les initiatives locales témoignent de l’intérêt des acteurs, publics ou privés, pour ce modèle nouveau, la pérennité de ces market places reposera beaucoup sur la qualité du service et l’adhésion des commerçants et des consommateurs à ce modèle de proximité.


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