Les nouvelles routes de la soie : enjeux et conséquences logistiques pour la France

La route de la soie évoque l’histoire des transports internationaux entre la Chine et la méditerranée. Elle consistait en un faisceau de pistes permettant aux marchandises les plus précieuses en provenance de Chine d’être acheminées vers l’Europe. Pour des raisons politiques diverses, ces routes ont été abandonnées au 15ème siècle. Mais ce nom évoque la puissance économique chinoise et sa capacité à exporter dans le monde entier.


Le Président chinois Xi Jinping a choisi cette référence historique pour imaginer, dès 2013, un vaste réseau d’infrastructures routières et surtout ferroviaires, permettant de relier la Chine à l’Europe. Il ne s’agit pas d’une voie unique, mais d’un maillage de voies qui traversent de multiples pays, souvent sous-équipés en infrastructures routières et ferroviaires. Ce projet est donc d’abord un projet géopolitique, qui confronte la Chine avec les autres grandes puissances impliquées, notamment la Russie et l’Inde.

Les échanges entre l’Union Européenne et la Chine représentaient 515 milliards € en 2016, soit 20% des flux import et 10% des flux export de l’UE. Multiplier les opportunités d’acheminement des biens, notamment pour les exportations chinoises, constitue un enjeu majeur.

Pour les logisticiens, ce gigantesque projet d’investissement chinois se traduit déjà par une réalité : des trains directs de marchandises entre la Chine et l’Europe. Certains trajets sont l’occasion d’importantes actions de communication mettant en valeur ces nouveaux axes, autant d’opportunités pour élargir encore un peu plus le périmètre commercial et économique de la Chine.
Outre les intérêts géopolitiques de la Chine, le train présente plusieurs avantages par rapport au transport maritime : il est plus rapide. Les trajets durent de 15 à 20 jours pour effectuer les 11 000 kilomètres, soit moins que le trajet maritime. La distance, qui est de 20 000 km par la voie maritime, est ainsi réduite. Le potentiel de raccourcissement de cette durée semble significatif, surtout si les moyens de transfert des marchandises dus aux écartements des voies (1,435 m en Europe et en Chine mais 1,520 m en Russie, Mongolie, Kazakhstan) sont améliorés. Le ferroviaire présente en outre une grande souplesse, permettant de multiplier les points de destination sur les pôles de consommation européens. Sur le plan environnemental, il constitue une alternative intéressante, notamment en permettant de réduire l’utilisation du fret aérien.

Depuis les premiers voyages effectués en 2011, ce sont plus de 6000 trajets ferroviaires qui ont été réalisés entre 35 villes chinoises et 34 villes européennes. La ville d’Urumqi, située dans le nord-Ouest de la Chine, aurait ainsi été le point de départ de 1 164 voyages à fin 2017. Ce chiffre devrait être de 1400 uniquement pour l’année 2018. Les prévisions chinoises annoncent 5000 trains par an. Avec au minimum 36 containers 40’ par train, c’est alors une capacité annuelle de 360 000 EVP dans chaque sens qui est mise en place entre les deux espaces économiques.
Nous sommes bien loin des 200 millions de containers EVP qui transitent chaque année par les ports chinois, dont une partie significative est à destination de l’Europe. Mais le marché du ferroviaire pourrait concurrencer de façon plus significative le fret aérien.
Le prix actuel du transport ferroviaire entre la Chine et l’Europe est plus élevé que le fret maritime mais il reste incomparablement plus faible que le fret aérien et constituera sans aucun doute une alternative.

Le transport ferroviaire constitue aussi une opportunité pour le développement des grands pôles multimodaux en Europe.

Ainsi, en novembre 2017, Decathlon a reçu un premier train de 41 wagons à Dourges, en provenance de Wuhan, dans le centre-est de la Chine, à 10 800 kilomètres. Des trains sont également mis en place entre cette même ville chinoise et Lyon.

Les pôles multimodaux terrestres trouvent là un potentiel de développement de leurs activités en continuant à attirer sur leur territoire de grandes implantations logistiques de biens de consommation.

Un des enjeux sera, comme pour le fret maritime, de parvenir à des flux plus équilibrés entre la Chine et la France, afin de permettre l’utilisation des capacités de transport export au départ de la France. L’arrivée annoncée sur le territoire français des grands e-marchands chinois, Alibaba et JD.com constituent peut-être des opportunités nouvelles afin d’utiliser ces capacités et développer les exportations françaises.
 
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